J’ai envie de la buter. Ça me ronge la couenne comme un putain de parasite me sucerait le sang. J’ai plein de questions qui bourrent mon crâne. Je n’arrive pas à trouver de réponse, ça me rend dingue. Quoi de pire, pour un flic, que de patauger dans un bordel sans nom ? J’ai envie de rire et envie de hurler. J’ai envie de me transformer et de buter des gens sans raison. Mais il y a ma raison qui me rattrape. Celle qui me dit de me calmer, que ce n’est pas raisonnable, que je ne suis pas un monstre, que je vais y arriver. Elle me fait bien rire, ma raison, aussi. Je lui ris au nez en permanence parce qu’elle me dit que de la merde. J’ai des espoirs plein le cœur depuis que j’ai huit ans. Aucun ne s’est réalisé. Putain d’utopies à la con. L’espoir, ça rend juste imprudent. Tu te fixes des objectifs que tu ne tiendras jamais. Et puis tu fonces tête baissée dès qu’une opportunité se présente. Sans réfléchir, en général. Sans vraiment te rendre compte des conséquences qu’il risque d’y avoir ensuite. En fait, tu redeviens juste un gamin paumé. Sauf que là, tout le monde voit que tu es adulte et responsable. Et que tu vas payer chaque connerie par le double. Ce qui me hante, ce soir, c’est la Commissaire. Avec son air fermé, sa bouche pincée, ses jambes croisées. Son petit corps qui hurle ouvertement qu’elle va bientôt éviscérer des coupables à coup de hache. Sa petite voix qui crie qu’elle hait les monstres. Les monstres qui tuent, les monstres qui jouissent de leur puissance. Les monstres que personne ne comprend et qui ne comprennent rien sur personne non plus. Les monstres qui rôdent dans l’ombre pour seulement faire couleur le sang. Les monstres dangereux qui courent après les innocents. Les monstres comme moi. Comme mon fils. Comme les Yakamas. Ceux que je suis censée protéger, ceux que j’aime, au-delà de mon cœur de marbre. Ceux pour qui je survis. Je ne sais pas qui elle est. Ça me rend folle. Est-ce qu’elle va finir par sortir son flingue et me tirer au milieu du front ? Est-ce qu’elle cherche à m’amadouer pour mieux me berner ensuite ? Est-ce qu’elle n’est qu’une simple petite mortelle qui a découvert le poteau rose ? Ou est-ce qu’elle a grandi avec eux, avec ces fils de pute qui m’ont enlevé tant d’êtres aimés ? Je n’ai pas de réponse. Son dossier est bourré d’informations qui n’ont aucune valeur. Ses yeux silencieux ne reflètent que mon questionnement. Et moi, je m’enterre chaque jour un peu plus avec mes doutes.

Et cette question, qui me taraude : puis-je lui faire confiance ? Et si je me plantais ? Eh bien, elle me plantera. Je ne sais plus, je ne sais pas. J’ai envie de tout foutre en l’air, d’aller frapper à sa porte pour lui faire cracher la vérité. De la prendre par la gorge pour enfin trouver la paix. Et l’étouffer, si jamais elle fait partie des leurs. Ou l’égorger. Ou l’éviscérer. Mais ça non plus, je ne sais pas. J’ai envie de lui faire confiance, comme j’ai envie de la haïr. Elle me rend dingue, avec son flingue à la ceinture, qui me met le frisson. Ce frisson de crainte que je déteste. Ce même frisson que j’ai lorsque je fais face aux Sionistes. Ceux que je ne devrais pas chasser, et pourtant… « Ava ! » que je hurle, poings déjà serrés. L’un d’entre eux risque de m’échapper d’une seconde à l’autre pour aller défoncer un mur. « AVA ! » que j’hurle encore, alors que j’ouvre la porte sans frapper. Ma colère n’est que le témoin de ma haine. Je m’en fous, de l’autorisation. Ce n’est plus l’heure pour ça. Ma course finit près d’elle. Avalon. La simple vision de sa chevelure noire me fait l’effet d’une bombe. Mes mâchoires se serrent encore plus. Mon sang commence à bouillonner. « Il faut que je te vois. Tout de suite. » En général, je ne lui laisse pas le choix. Ça fait plusieurs années que ça dure. Au début, je ne pensais pas que je pourrais attacher une quelconque importance à une satanée sorcière. Dieu sait à quel point je ne peux pas les blairer. Mais il y a des exceptions partout. S’en est une, visiblement. Elle me toise, comme à l’accoutumée. Elle ne dit rien, comme d’habitude. Elle ne dit jamais grand-chose, Avalon. C’est ce qui la caractérise. Même si j’ai l’impression de faire un putain de monologue. « Elle va me rendre cinglée. » Que je sors déjà, alors que je ferme la porte. Faut que je trouve un endroit pour m’asseoir. Non, il faut que je marche. Alors je fais les cent pas. Comme toujours. C’est un bordel qui n’a pas de fin. « Elle va me rendre cinglée, j’ai envie de… j’ai envie de la secouer dans tous les sens, de lui arracher la langue pour lui faire cracher la vérité ! Je ne sais pas si elle est des leurs ! Je ne sais pas si elle pourrait me buter en deux secondes, alors que j’ai le dos tourné ! Je ne sais pas si elle sait ce que je suis, et si elle n’essaierait pas d’avoir plus d’infos avant de foutre son gros nez dans ma vie ! Ou alors je me trompe, et je risque de me prendre une balle quand même ! Ou d’être renvoyée ! Et qui nourrirait Adsila ? Je ne sais pas quoi faire ! Que dois-je faire ? » Et je tourne en bourrique. Et je tourne en rond. Ma tête avec mes pieds. « ça me rend folle ! Je suis tellement en colère que j’ai envie d’aller égorger toute une assemblée ! Et en même temps, je me fais peut-être des films ? Je ne sais pas ! Je ne sais pas ! Avalon, aide-moi ! » Je lui hurle dessus, comme si elle allait pouvoir trouver une solution miracle. Mais c’est ça qu’elle fait toujours, Ava, trouver des solutions magiques. C’est ça qu’elle fait, pas vrai ? Alors je passe une main sur mon visage, comme si ça allait m’aider. « Tu sais ce que je dois faire, toi, n’est-ce pas ? Tu sais toujours tout, tu sais toujours la réponse ! »

   

Il y à des soirs où Avalon se sentait beaucoup plus mélancoliques qu'a d'autres. Ce soir là en était un, elle avait l'impression d'évoluer dans une bulle où toutes les autres sensations lui étaient interdite. La tristesse et le désespoir la guettaient, attendant la faille pour s'y engouffrer. C'était toujours ainsi ces soirs là. Elle résistait tant bien que mal parce qu'elle avait déjà bien trop sombré quelques années auparavant, elle ne pouvait plus se le permettre. Elle sortit du bain d'eau brulante, et fixa la peau de ses doigts qui avaient fripés. La pièce était pleine de buée et d'un mouvement de main et par la magie elle la chassa et en gorgea les plantes vertes qui inondaient la façade Sud de la pièce. Elle enfila un kimono et le resserra autour de sa taille alors qu'elle traversait son étage pieds nus.

Ces soirs là elle pensait toujours à son mari, son très cher Gowan parti si tôt, le nœud du problème, le nœud de sa noirceur qu'il avait couler autour de sa gorge en mourant. Il lui avait permis d'abandonner ses démons mais ceux - ci étaient revenus encore plus fort après sa mort. Ils n'en avaient eu que faire de l'enfant qu'elle portait, la mort de Gowan l'avait détruite pour toujours. Elle descendit les escaliers sans s'en rendre compte et se retrouva dans son salon plonger dans le noir, sa main trouva l'interrupteur et alluma un petit halogène dans le coin de la pièce. Auraient - ils été heureux? C'est cette questions sans réponse qui lui faisait le plus mal.

Alors qu'elle s'asseoit dans son canapé, ses jambes nues ramassées sous elle un frisson magique la parcours, elle sent quelque chose roder près d'elle. C'est alors qu'elle entends son prénom depuis l’extérieur et toute sa mélancolie se chasse, ses démons sont toujours les plus forts. Ces un hurlement que pousse Yuma. La louve rentre chez elle sans même frapper, n'importe qui d'autre aurait fait cela aurait subi les foudres de la sorcière mais Avalon laisse la femme venir jusqu'a elle sans même se bouger. Cette louve est une furie comprimée dans un carcan qu'Avalon se fait un malin plaisir de faire éclater, elle la pousse à bout, défaisant les liens de la camisole pour voir jusqu'où la brutalité de la louve peut aller. Dès leur première rencontre Avalon à sentit cette noirceur en elle, comme si deux êtres aussi sombres qu'Avalon et Yuma ne pouvaient que se reconnaître sauf que la louve n'en est pas encore consciente.

Alors Avalon la laisse s'époumoner sans s'émouvoir, tressant calmement ses cheveux alors que Yuma déverse sa haine pour sa supérieure, son sentiment d'insécurité face à cette femme ne fait qu'apporter de l'eau au moulin d'Avalon. Yuma est comme un loup en cage, prête à bondir sur le premier qui apparaîtra, ou sur le premier qu'Avalon lui dira de tuer. Elle n'est pas encore au stade de la manipulation assez puissante pour la forcer à tuer pour elle, mais la sorcière s'en approche lentement.  Et voila qu'elle la supplie de l'aider, c'est comme du miel à ses oreilles. La sorcière déplie ses jambes d’albâtre avec une lenteur exagérée.

Tu sais que je suis là pour toi Yuma, je l'ai toujours été n'est ce pas? Et je t'ai toujours dit que la solution de facilitée n'était jamais la bonne, cependant cette femme deviens menaçante pour toi et ta meute. Et par extension pour mon clan. Tu ne voudrais pas nous mettre en danger n'est ce pas?

Elle pris une longue inspiration par le nez comme si elle reflechissait et replaça un peu son kimono. Elle avait déjà la solution toute trouvée mais elle devait faire mariner encore Yuma, la faire bouillir comme une cocote minute.

Il faut prendre les décisions qui s'imposent quand on est leader d'un clan, ou Alpha comme toi. Même si elles implique des sacrifices et des moments difficiles.

Elle tendit la main vers Yuma.

Tu sais que quoi qu'il arrive je protégerait ta meute et ton fils en particulier, comme toi tu protégera mon clan quoi qu'il se passe. C'est ce que nous nous sommes promises tu te souviens?

Ava aussi, elle me rend dingue. Pas comme la Commissaire. C'est différent. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas comment non plus. ça me rend dingue. Juste à la regard, et je me mets dans une rage sans nom. A peine je l'entends que mon putain d'esprit me joue des tours. C'est bizarre. D'habitude, avec une rage pareille, la Louve serait déjà sur mon dos. A ma place, entrain de courser le premier gamin qui jouerait au con. Mais avec Avalon, elle ne vient jamais la Louve. Ou plutôt, elle ne sort jamais. Je ne sais pas si c'est mon intention de ne pas la foutre dans une merde noire, ou si la Louve a peur d'elle. J'en sais rien. Et ça tourne tellement que ça n'a même pas d'importance, de toute façon. La seule chose qui importe, c'est tout ce qu'elle me dit. ça n'impacte pas vraiment mon cerveau, ou peut-être trop. En fait, je ne sais même plus ce qui m'arrive. J'ai seulement Avalon devant moi, dans son écrin noir, et ses paroles qui me bercent. « Tu sais que jamais je ne nous mettrais dans une merde pareille. Mais si j'agis sans être certaine qu'elle est une menace, j'ai une chance sur deux de tout faire foirer, et de justement faire ce que je ne veux pas faire. » Le calme ne parvient pas à me rattraper, sur le moment. Derrière mon crâne, la Louve fait des siennes. Elle grogne, la petite teigne, elle réclame sa liberté. J'ai envie de lui éclater le museau, à elle aussi. Putain, je suis dans un état incroyable.

Le bordel que je pourrais foutre. Ouais, ça me rend dingue. Si jamais la Commissaire est une Sioniste... Elle pourrait tous nous découvrir. Tous nous faire buter. Moi. La Meute. Le Clan. Ava... Cette seule idée me donne une nausée incontrôlable. J'ai mal au bide rien qu'à y penser. ça me rendrait folle de la voir se faire déglinguer. A croire qu'elle pourrait faire partie de la Meute, ce serait la même chose. Il faut que je me calme. Une minute. Alors j'arrête de tourner, quand elle me tend la main. Comme à chaque fois, elle parvient à faire tomber ma fièvre. Elle est incroyable. Unique, en fait. Et comme toujours, je me laisse aller à son geste. ça me rend folle. Tout me rend folle. Est-ce que c'est elle qui me rend folle ? J'en sais rien, je sais plus... La sensation de sa chaleur est une baume au coeur. ça me rend nerveuse et détendue à la fois. Qu'est-ce qui m'arrive ? Je m'assois près d'elle. Sans être trop près. C'est bizarre. On dirait que quelque chose m'empêche d'aller encore au-devant d'elle. Le respect, sûrement ? La réserve ? Putain, c'est quoi ces questions ? « Je n'ai pas oublié ce que nous nous sommes promis. Tu sais que jamais je ne mettrai nos alliés en danger. Je ne te mettrai jamais en danger non plus. » Putain, j'ai encore ma main dans la sienne. Je la lâche à peine la pensée arrivée. Je suis une putain d'idiote. Alors je passe une main dans mes cheveux. Comme si ça allait changer quelque chose. « Je suis désolée de rappliquer comme ça, tu sais comment je suis quand je pète les plombs. Tu es la seule à pouvoir me calmer dans ce genre de cas. Je ne sais pas pourquoi je suis toujours obligée de venir te voir quand ça arrive. » Et puis je la regarde. Je ne devrais pas, parce que je réalise qu'elle n'a quasiment pas de vêtements. ça a le don de me foutre le rouge à la tronche. Cette même tronche que j'ai actuellement envie de gifler. Et la Louve, en même temps, qui fait remonter son instinct de merde avant que je relève les yeux. « Mais elle me rend dingue. Je n'ai pas assez d'informations sur elle. Je n'ai aucun indice. Il faut que j'en trouve avant de lui sauter à la gorge. » Je secoue la tête. J'ai besoin de fermer les yeux. Juste pour que le molosse se calme. Juste pour éviter que le canidé ramène sa gueule d'ange. « Le truc c'est que je ne sais pas comment je vais pouvoir me calmer. »

   

Avalon n'avait jamais eu affaire à la louve qui habitait Yuma. C'était un fait étrange et intéressant qui motivait d'autant plus la sorcière à continuer son petit jeu avec l'amarok. Elle se demandait si la louve avait peur d'elle ou si c'était seulement parce que Yuma la contrôlait encore assez pour ne pas la laisser filtrer. Cette question titillait Avalon qui pourtant poussait la colère de Yuma au plus loin, l'attisant comme on jetterais de l'essence sur un feu. L'état de Yuma est proche de l'implosion, Avalon devra remercié cette commissaire un jour, de lui facilité autant la tâche. Enfin si c'est une sioniste Avalon aura fait d'une pierre deux coups, elle aura pris le pas sur Yuma et aura fait tuer une sioniste mais pour l'instant la louve n'est pas encore prête à sortir les crocs, il reste encore une part de rationalisme de sa colère, mais Avalon la sent se fragilisé de minute en minute.

Si cette femme s'avère être une de nos ennemis elle pourrait nous faire beaucoup de mal, pas seulement au tiens, à ton fils mais aussi aux miens et à tout ceux qui gravitent autour de nous. Il faut que tu en tienne compte.

Enfoncer le couteau profondément et tourner la lame dans la plaie. Pendant une seconde Avalon imagine Yuma entrain d'affronter une sioniste et l'idée qu'elle puisse être blessée voir tuée lui est désagréable. Peut être parce qu'elle perdrait un fabuleux jouet avec du potentiel, ou peut être juste parce qu'elle s'est attachée à cette femme au sang bouillant. Mais elle préfère se dire que sa noirceur la pousserait à regretter Yuma seulement pour la distraction qu'elle lui apportait. Avalon ne retire pas sa main alors que Yuma s'asseoit, elle semble calme. C'est là que Avalon doit plonger dans la faille, s'insinuer pendant la tempête ne sert à rien, elle doit le faire pendant ses accalmies. Elle semble se rendre compte de leur mains nouées et la lâche avec trop de précipitation, la sorcière sourit devant la gène de la femme. Elle se penche un peu vers la louve.

J'ai confiance en toi tu le sais, mais je ne peux m'empêcher d'avoir peur pour mon clan tu le comprends parfaitement j'en suis sure.

Se faire passer pour une petite chose qui à besoin d'être protégée, faire enfler ce désir de protection chez la louve pour la pousser à la faute. Et la bête rougit en regardant ses courbes et Avalon sait qu'elle à ferrée la louve. Elle laisse échapper un petit rire mélodieux et n'hésite pas à mettre en avant ses jambes dans un geste désinvolte.

Ne t'excuse pas Yuma tu es la bienvenue ici, je préfère que tu pète un cable ici plutôt que en public. Tu sais que tu peux venir quand bon te semble. Je t'offre un thé pour te calmer? Tu peux aussi prendre un bain chaud, j'en sort tout juste comme tu a du le remarquer.

Elle fronce le nez, mutine, en se désignant puis elle se lève souplement et fait signe à Yuma de la suivre dans la cuisine où elle met la bouilloire en route, puis elle se penche sur le plan de travail.

Je sais que nous n'avons pas beaucoup d'informations sur elle mais tu dois faire confiance à ton instinct, si tu sent qu'elle peux nous faire du mal n'hésite pas. Je t'aiderais s'il le faut, je n'ai pas peur de me salir les mains tu le sais.